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Nos articles de blog consacrés à des événements et des lieux liés de près ou de loin au domaine de l’art tribal africain.

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Musée de Boulogne-sur-Mer - Art d'Océanie et d'Amérique du Nord

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Si les grands musées dédiés aux arts premiers sont connus de toutes et tous, collectionneurs ou non, parmi lesquels le Musée Royal de l’Afrique Centrale auquel nous avons déjà consacré un article ici et un autre là, le Musée du quai Branly, et bien d’autres grandes institutions situées de par le monde, il n’en va pas nécessairement de même en ce qui concerne les structures plus provinciales.

Ainsi, je vous propose de découvrir ici les remarquables collections d’art tribal d’Océanie et d’Amérique du Nord présentées au Musée de Boulogne-sur-Mer.

Des pièces exceptionnelles y sont exposées allant des masques très graphiques des Inuit jusqu’au chefs-d’œuvre de raffinement provenant des îles du Pacifique. Le musée ravira aussi les amateurs de tableaux de maîtres célèbres, d’archéologie égyptienne et grecque.

Vous reconnaîtrez ci-dessous des pièces bien connues, maintes fois publiées. Les rencontrer “en personne” relève cependant d’une expérience bien différente, c’est pourquoi je ne peux que vous inciter à faire le déplacement à Boulogne-sur-Mer pour observer en détails et sous tous les angles ces œuvres intemporelles et vous imprégner de leur puissance.

Le département d’ethnographie extra-européenne

La richesse exceptionnelle du département d'ethnographie extra-européenne inclut une collection d'objets d'Alaska qui rassemble un ensemble unique au monde de masques cérémoniels sugpiat de l'île Kodiak ramené par le boulonnais Alphonse Pinart en 1872.

Une des collections d'art tribal d'Océanie les plus importantes du nord de la France est également conservée au Musée de Boulogne-sur-mer.

Masque Koniag, île Kodiak, Alaska

Cet masque est publié sur la couverture de l’ouvrage L’art du Grand Nord, Citadelles & Mazenod, 2001

Peuples de l’Arctique

La culture Sugpiaq

La culture Sugpiaq était une société de chasseurs de mammifères marins. Elle s'étendait sur la zone continentale du détroit de Prince William, la péninsule du Kenai, la péninsule alaskienne et l'archipel de Kodiak, en Alaska.

Les masques, nommés ginaqua (ce qui signifie «comme un visage, mais pas vraiment») étaient des objets emblématiques de cette culture. Ils étaient utilisés l'hiver, lors de festivités destinées à favoriser la saison de chasse suivante.
Les danses masquées étaient des moments importants de partage de croyances, de préservation de l'équilibre des forces qui régulaient la vie quotidienne.

Ensemble de masques Sugpiaq, île Kodiak, Alaska

D'en haut à gauche vers en bas à droite :

1. Angun / Vieil homme

2. Nallumalik / Celui qui ne sait pas

3. Nom illisible

4. Asghigik / Celui qui de la chance

5. Ingillagayak / Celui qui annonce le temps

6. Yuaulik / Chercheur

7. Payulik / Celui qui apporte la nourriture

8. Unartuliq / Protecteur

9. Unnuyayuk / Voyageur de nuit

10. Agu'lik / Large masque

Cependant, les Russes conquièrent l'ensemble de l'Alaska en 1784.
Développant le commerce des fourrures, ils forcèrent les Sugpiat à travailler dans leurs compagnies et les contraignirent violemment à la chasse et à la pêche en eaux lointaines. Cette domination brutale fit suite à d'importants massacres. Additionnée à de dramatiques épidémies, elle causa la perte de la majeure partie de la population Sugpiaq, ainsi que des croyances, pratiques et productions matérielles essentielles à cette culture. Une société métissée vit alors le jour, les Russes épousant des femmes autochtones. Les croyances sugpiat se fondirent progressivement dans le christianisme orthodoxe russe.

Alphonse Pinart arriva à Kodiak à un moment clé. En effet, les Russes se retiraient peu à peu et les Américains, qui leur avaient acheté l'Alaska cinq ans plus tôt, n'étaient pas encore totalement implantés. En 1871, il devait donc être plus facile d'observer les coutumes sugpiat et de collecter des masques et objets.

Les Sugpiat eurent ensuite à survivre à l'acculturation imposée par le gouvernement américain (interdiction de parler la langue autochtone), au dramatique tremblement de terre de 1964 qui détruisit une grande partie des villages de l'archipel de Kodiak, puis à la marée noire dévastatrice de l'Exxon Valdez en 1989. Malgré cette difficile histoire, le souvenir de certaines pratiques sugpiat a perduré au sein des commu-nautés. Aujourd'hui, des associations et des groupes d'artistes font revivre la tradition des masques et des danses qu'ils accompagnent.

 

Masque Kugukauk / Le préféré, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak, Alaska

Masque, nom inconnu, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak, Alaska

Masque, Nakllegnaq / Le pitoyable, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque Shugashat (féminin), culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque Igyuyrtulik / Chercheur, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque Allayak / Différent (féminin), culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Nayurta / Le veilleur, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Lurtusqaq / Celui qui est large, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Giinasinaq / Grand visage, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Qarua’at’stun Elnguq / Comme un corbeau, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Modèle réduit de kayak, culture Unangax, îles Aléoutiennes (Unalaska), XIXe siècle

Sur ce kayak miniaturisé, le personnage est en train de projeter une lance employée pour la chasse à la loutre, à l’aide d’un propulseur.
Sa parka en intestin animal lui permet de rester au sec et assure l’étanchéité de son embarcation en étant fixée au rebord de la place.

La culture Yup’ik


Les Yupiit vivent sur la côte Sud-ouest de l'Alaska, dans la région du Yukon-Kuskokwim, la baie de Bristol et l'ile de Nunivak.

Avant les colonisations, les Yupiit étaient une culture semi-nomade. Pendant le printemps et l'été, les familles se dispersaient dans des camps de pêche et de chasse au gré des déplacements du gibier, mais retournaient dans le village permanent pendant l'hiver.
Ces villages pouvaient regrouper jusqu'à 300 personnes. Les hommes vivaient ensemble dans la maison des hommes (gasgiq) et les femmes et les enfants vivaient par groupe dans des maisons semi-souterraines plus petites.

Lunettes à neige, culture Yup’ik, Saint-Michel, Baie de Norton, Alaska, XIXe siècle

Pendant l'hiver, la gasgiq était le centre de la communauté où se déroulaient les cérémonies traditionnelles telles que le Bladder festival (festival de la vessie).
Dans les croyances Yupiit, le cycle de la vie ne s'interrompt jamais et l'esprit de tout être vivant se réincarne après la mort. Ainsi, l'esprit des animaux chassés doit être traité avec attention pour permettre cette réincarnation.
Le phoque qui reconnaît les mérites d'un chasseur va l'autoriser à le tuer. Son esprit se transporte alors dans sa vessie, ainsi lorsque son corps meurt pour offrir de la nourriture au chasseur, son esprit reste vivant dans la vessie jusqu'à ce qu'il retourne dans la mer.
Le Bladder festival est donc une célébration du cycle de la vie. Le chasseur Yup'ik collecte les vessies des phoques tués pendant la saison et à la fin des célébrations les remet à l'eau pour permettre aux esprits des phoques de renaître pour la saison suivante.

Les contacts des Yupiit avec le monde extérieur ont été plus tardifs que pour les autres cultures d'Alaska. Ceci leur a permis de conserver d'avantage leur style de vie et leurs coutumes.
La langue traditionnelle est toujours parlée et leurs traditions encore connues actuellement. L'étude de la culture Yupik a notamment permis à la culture Sugpiaq très proche de combler des lacunes dans la connaissance de ses propres traditions.

 

Support de pagaie en forme de nageoire de morse, culture Yup’ik, île de Nunivak, Alaska, XIXe siècle

Ci-dessus, un masque “Jenna Class”, culture Kaigani Haida, Côte Sud-Est de l’Alaska composé de bois, verre et tendon. Il date du début du XIXe siècle.

Collecté dans un contexte différent du reste des objets alaskiens du musée, ce masque représentant un visage paré d'un labret (ornement de lèvres) appartient à la culture Kaigani Haida (côte Nord-Ouest des Etats-Unis).
Rapporté par le Vice Amiral de Rosamel qui l'offre au musée de Boulogne en 1838, il est le premier objet alaskien à entrer dans les collections.

Ce masque représente un visage féminin. En effet, dans les cultures Haida, Tlingit et Tsimshian, au moment de l'adolescence, les jeunes filles avaient la lèvre inférieure percée afin d'y insérer un ornement dont la taille devenait de plus en plus importante chaque année. Le port de labret dans la lèvre inférieure était donc réservé aux femmes.

Ce type de masque représentant une femme parée d'un labret est connu dans les cérémonies Haida, cependant celui-ci semble faire partie des objets réalisés dans le but de les offrir en cadeau aux marins européens de passage dans les villages.
En effet, on connaît une douzaine de ces masques sculptés par un même artiste dans les années 1820 à cet effet. Bien que ces masques n'aient pas été portés, ils reprennent les formes et symboles propres aux objets traditionnels.

Le nom de « Jenna Cass », associé à ces masques en raison d'une annotation sur l'un d'entre eux, proviendrait du mot « Djiláqons », désignant une figure féminine récurrente de la mythologie Haida, mère de tous les aigles.

Visière de chasseur elqiaq, culture Yup’ik, Saint-Michel, Baie de Norton, Alaska, XIXe siècle

Parcours des mondes : escale dans les lagons et îles volcaniques

Le plaisir des yeux ne s’arrête pas là. Une fois repu des trésors d’art traditionnel arctique, d’autres salles nous emmènent dans les mers du Sud à la découverte des joyaux d’art océanien.

D’île en île, nous découvrons la richesse, la finesse et la diversité des artistes insulaires de Polynésie, de Nouvelle-Zélande, de Nouvelle-Calédonie, des îles Carolines et bien d’autres encore.

Modèle réduit de pirogue de guerre, culture Maori, Nouvelle-Zélande, XIXe siècle

Le chef-d'œuvre sculptural ci-dessus, un modèle réduit de pirogue de guerre, fut collecté par Dumont d'Urville sur le navire l'Astrolabe en 1827.
Il l'aurait acquise auprès d'un chef de la baie de Tolaga en Nouvelle-Zélande.

Les pirogues de guerre Waka Taua étaient la fierté des groupes. Elles pouvaient mesurer de 18 à 21 m de long et porter une centaine de guerriers.

La poupe Taurapa se présente sous la forme d'une frise verticale de bois ajourée, dans laquelle une figure de manaia (esprit protecteur) tient deux bandeaux parallèles.

Sur la proue, une figure agressive tirant la langue peut être interprétée comme Tumatauenga, dieu des hommes et de la guerre.
Derrière cette figure, les motifs de spirales encadrant un personnage de face sont souvent compris comme une référence au mythe de la création du monde maori, qui rapporte que la lumière (les spirales) fut introduite dans le monde grâce à la séparation de la mère-terre, Papa, et du père-ciel, Rangi, par leur fils Tane (dieu des forêts).

Ce type de modèle pouvait avoir un usage rituel, et certains furent utilisés comme cadeaux prestigieux aux européens.

La navigation guerrière

Dans de nombreuses régions d'Océanie, les populations entretenaient entre elles des relations d'opposition et l'état de guerre y était parfois une situation endémique.

Les motivations des attaques pouvaient être très diverses : luttes pour le territoire et luttes de pouvoir, vengeance de la mort de l'un des membres du groupe attribuée à la sorcellerie d'un groupe voisin, raisons religieuses et rituelles.

Souvent, les attaques privilégiaient la voie maritime ou fluviale (les affrontements navals semblent toutefois avoir été extrêmement rares) ; les guerriers parés et armés prenaient alors place dans de grandes pirogues de guerre dont on trouve des exemples variés partout en Océanie.

Miniature de proue de pirogue, culture Maori, Nouvelle-Zélande, XIXe siècle

Ces embarcations étaient en général très décorées de motifs aux significations puissantes et pouvaient transporter plusieurs dizaines d'hommes.
De même que la totalité des activités guerrières et des objets matériels en lien avec celles-ci, elles étaient entourées de nombreux interdits et de multiples pratiques magiques destinées à assurer le succès de l'entreprise. Dans la plupart des cas, les affrontements en Océanie étaient très ritualisés et faisaient intervenir des systèmes complexes de compensation du sang versé dans des échanges entre les acteurs.

Loin de n'être qu'un chemin d'attaque, le milieu marin fournissait aussi un certain nombre d'éléments qui s'intégraient à l'équipement du guerrier.
Ainsi des matières dures telles que la nacre, les dents de requins ou les coquillages apparaissaient par exemple dans de nombreuses armes et parures portées lors des guerres.

Pagaie cérémonielle, archipel des Australes, Polynésie française

Le concept de “mana” dans les îles du Pacifique

Les peuples d'Océanie vivent en corrélation avec les ancêtres, les esprits et les dieux.
Les motifs développés pour les représenter se retrouvent dans plusieurs formes d'expression artistique telles que tatouages, masques, statues, tablettes votives et armes cérémonielles.

Les objets d'art sont en effet utilisés pour entrer en contact avec les esprits ou les ancêtres, et pour les faire intervenir dans ce monde.

Ce pouvoir rejoint le concept de « mana ».

 

Statue Tiki, archipel des Marquises, Polynésie française, XIXe siècle

Ce terme signifie « puissance », « efficacité », « force de vie ».
Le mana peut être la manifestation du pouvoir des dieux dans le monde des hommes, il s'agit alors d'une force active, associée aux ancêtres et héritée de ces derniers.
Il est aussi considéré comme une substance invisible dont sont pénétrés les objets et les êtres humains.
Les hommes le reçoivent des esprits du clan par transmission généalogique ou encore l'obtiennent des dieux ou des forces cosmiques. Ils le conservent s'ils se comportent bien; sinon, ils le perdent. La possession du mana se révèle par la réussite dans les différentes actions.

Dans toutes les cultures où ce concept est en usage, l'œuvre d'art est l'un des principaux moyens permettant d'appeler le mana dans ce monde-ci.

Le choix des matériaux et de l'iconographie répond à cette préoccupation.

Étriers d’échasses, archipel des Marquises, Polynésie française

Massues U’u, archipel des Marquises, Polynésie française

Le corpus des célèbres massues u’u des îles Marquises est restreint et amplement documenté, en partie grâce au travail réalisé par le Musée du quai Branly.

Lors du vernissage de notre galerie en 2022, nous en exposions une au public, qui a trouvé un heureux acquéreur depuis.

Ci-dessous, divers types de massues et casse-têtes du Pacifique dont une massue Ula des îles Fidji dont un bel exemplaire est disponible à la galerie.

Masque Kanak, Nouvelle-Calédonie

Statuette Korwar, Papouasie-Nouvelle-Guinée

Masque Tapuanu, îles Mortlock / îles Carolines

C’est également un masque des îles Carolines qui détient actuellement le record du monde de prix payé par un enchérisseur : l’acheteur du masque tapuanu de la collection Michel Périnet a en effet du débourser 9 171 000 € chez Christie’s Paris en 2021 pour l’obtenir.

Appuie-nuque, rivière Pora-Pora, Papouasie-Nouvelle-Guinée

Des collections d’objets d’art tribal d’Afrique, d’Océanie et du Grand Nord à découvrir en bord de mer, à quelques heures de route de la Belgique.

Pour une découverte plus proche de chez vous, visitez notre galerie située au cœur de la ville de Nivelles, à quelques kilomètres de Bruxelles. Des chefs-d'œuvre moins connus vous y attendent.

Visite de la collection permanente d'art ethnographique du MRAC

Administrateur Administrateur

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Musée royal de l’Afrique centrale

Visite des collections ethnographiques avec Galerie Loiseau & Zajega Arts

Loiseau & Zajega vous font découvrir aujourd’hui la collection permanente d’objets ethnographiques du Musée royal de l’Afrique centrale. Faute de pouvoir le visiter en cette première moitié d’année 2020, appréciez une sélection d’objets de République démocratique du Congo, d’Angola et de Zambie grâce à notre reportage photo. Cet article fait suite à la visite de l’exposition temporaire “Art sans pareil” que nous vous proposions en octobre dernier.
Pensez à cliquer sur les images pour les agrandir.

Statues du culte des ancêtres

Les statues d’ancêtres expriment la sagesse et la force spirituelle de l’ancêtre qui veille sur sa descendance. Elles occupaient une place centrale dans les offrandes et les rites visant à attirer les faveurs des ancêtres. Elles étaient également utilisées pour légitimer le pouvoir du chef ou confirmer son autorité sur un territoire.

  • Statue d’ancêtre Bembe EO.0.0.14798
    Baraka, Sud-Kivu - Cordia africana
    Offerte par M. Piletteo, 1913
    Cette statue représente un ancêtre Luba. La barbe et la coiffure en croix indiquent un statut social élevé.

  • Statue d’ancêtre Hemba EO.1992.28.1
    Sayi, Tanganyika - Milicia excelsa
    Offert par R. Boël, 1992
    Cette statue est l’oeuvre d’un artiste Hemba. Les mains symbolisent la succession des générations.

  • Statue d’ancêtre Kipona Hemba EO.1972.171
    Province du Katanga - Pterocarpus tinctorius
    Achetée à E. Deletaille, 1972

Les peuples Bembe attribuaient aux statues d’ancêtres un nom et une place dans l’arbre généalogique. Généralement, elles étaient conservées ensemble dans de petits sanctuaires.

Statues tombales Yombe

Au début du XXe siècle, des statues en bois hautes en couleur apparaissent sur les tombes yombe. Elles représentent un homme ou une femme tenant en main une bouteille et une tasse, voire un instrument de musique. Parfois, un parapluie ou un petit toit de bois et de feuilles de bananier les protégeait de la pluie.

  • Statue tombale Yombe : EO.0.0.1040-2
    Offerte pas H. Deleval, 1910

  • Statue tombale Yombe EO.1960.32.1
    Achetée à E. Beer, 1960

Entre la vie et la mort

En Afrique centrale, la mort est souvent considérée comme le passage du monde des vivants vers celui des morts. Les membres décédés de la famille y sont commémorés avec respect et déférence. Ils exercent un impact continu sur le bien-être des vivants, mais sont souvent imprévisibles.
Ceux qui ont mené une vie exemplaire et conçu une nombreuse progéniture acquièrent le statut d’ancêtres dans la mémoire de la société. Les ancêtres sont invoqués lors de problèmes divers, ou peuvent apporter la prospérité collective sous forme de pluie ou de succès à la chasse. Un ancêtre peut aussi se réincarner dans le corps d’un nouveau-né et revenir ainsi parmi les vivants.

Il émane de ces statues de l’autorité et de la dignité. Elles représentent probablement le chef tabwa Kansabala et son épouse, à moins qu’il ne s’agisse de leurs ancêtres. L’ajout de matières médicinales et de cornes d’antilope montrent que ces statues avaient également des fonctions protectrices. En 1884, ces statues ont été prises lors de l’expédition violente menée par le lieutenant Émile Storms à l’encontre des chefs tabwa Lusinga et Kansabala. Afin d’acquérir le contrôle de la région, Storms avait reçu l’ordre de soumettre les dirigeants africains à tout prix.

Jusqu’en 1930, ces statues se trouvaient dans la maison bruxelloise d’Émile Storms. Elles y figuraient parmi d’autre trophées témoignant de sa “victoire” sur les peuples tabwa.

  • Statue d’ancêtre Tabwa EO.0.0.31664
    Marangu, Tanganyika - Cola

  • Statue d’ancêtre Tabwa EO.0.31663
    Marangu, Tanganyika - Ficus mucuso
    Pièces saisies par Émile Storms en 1884 et offertes par sa veuve en 1930.

Seto et Nabo, statues des fondateurs Ngbaka

Ces statues représentent Seto et sa soeur et épouse Nabo, les père et mère originels des peuples Ngbaka. Seto et Nabo repoussaient les mauvais esprits et étaient invoqués en cas d’accident et de maladie, ou en cas de revers pendant la chasse.

  • Statue du fondateur mythique Seto Ngbaka EO.0.0.40032

  • Statue de la fondatrice mythique Nabo Ngbaka EO.0.0.40033
    Sud-Ubangi
    Pièces offertes par A. Bertrand, 1942

Masque et costume dans l’art africain

Un masque consiste en un masque couvrant le visage ou la tête, un costume et une chorégraphie. Ces éléments forment un tout indissociable mais sont rarement montrés ensemble en dehors de leur contexte d’origine. Avec leur goût de la sculpture figurative, les musées et collectionneurs occidentaux appréciaient surtout les qualités artistiques des masques faciaux ou couvrant la tête. Ils s’intéressaient moins aux costumes, notamment parce que ceux-ci étaient composés de matériaux plus périssables comme des fibres, des peaux et des plumes. Leur valeur artistique n’était guère reconnue et ils étaient rarement collectionnés.

  • Masque et son costume Kete EO.0.0.32538
    Mboie, Kasaï-Central - Vitex congolensis
    Offert par F. Wenner, 1930
    Les peuples Kete appartenaient au royaume Kuba et pratiquaient des rites funéraires complexes comparables. Ce masque dansait à la fin de la période de deuil, généralement un ou deux mois après le décès.

  • Masque Inuba Kuba EO.0.0.3704
    Kasaï-Occidental - Ricinodendron heudelotii
    Acquis avant 1898
    Le personnage d’Inuba intervenait lors des enterrements de chefs importants dans le sud de la région des peuples Kuba. Inuba approchait du cercueil et suppliait l’esprit du défunt de partir sans nuire à quiconque.

  • Masque Ishyeen imaalu Kuba EO.1951.31.213
    Kasaï - Ricinodendron heudelotii
    Acheté à R. Blondiau, 1951
    Ce masque dansait pendant les enterrements de membres de l’association des Babende. Les yeux en caméléon exorbités évoquent peut-être la capacité à voir l’invisible.

  • Masque Bongo Kuba EO.0.0.35309
    Kasaï-Occidental - Ricinodendron heudelotii
    Offert par H. Lambert, 1933
    Ce masque représente probablement Bongo, un personnage lié à l’association fermée des Babende. Les mouvements abrupts et débridés que le danseur masqué effectuait pendant la performance évoquent ses liens avec les ngesh, des esprits qui erraient dans la forêt.

Chaises européennes, images africaines

Les commerçants Chokwe reliaient les comptoirs européens de la côte aux peuples de l’intérieur du pays. Ces contacts donnaient aussi lieu à des échanges culturels et artistiques. Au XVIIIe siècle, les artistes Chokwe se sont mis à fabriquer des chaises d’inspiration portugaise. Elles sont devenues par la suite de véritables symboles de pouvoir.

  • Chaise Chokwe EO.0.0.20594
    Kasaï - Vitex donania
    Offerte par N. Arnold, 1917
    Cette chaise appartenait à un chef Chokwe. Les personnages qui ornent le dossier représentent des danseurs masqués.

  • Sceptre et tabatière Chokwe EO.0.0.41233
    Sandoa, Lualaba - Uapaca
    Acheté à Mrs R. Williame, 1945

Chez les Luba, les tabourets sont principalement utilisés pendant l’intronisation des chefs et des rois. Ils sont censés contenir l’esprit du chef politique et le protéger après sa mort. Le personnage sculpté représente la femme luba idéale.

  • Tabouret Luba EO.0.0.23137
    Ankoro, Tanganyika - Ricinodendron
    Acheté à F. Michel, 1919

Pendant leur intronisation, les chefs luba buvaient une boisson rituelle dans cette coupe. Les deux personnages qui tiennent la coupe représentent des esprits protecteurs. Les lézards qui ornent le couvercle rappellent les esprits terrestres que le chef devait garder sous contrôle.

  • Coupe Kiteya Luba EO.0.0.3861
    Tanganyika - Schinziophyton rautanenii
    Acquise avant 1898

Culture Lega : les objets d’art liés au bwami

Chez les peuples Lega, l’association bwami assurait la cohésion et la collaboration entre les villages. Elle a ainsi créé une forme d’organisation sociale et politique non centralisée. L’association bwami reposait sur une organisation hiérarchique. Les niveaux inférieurs s’occupaient de l’éducation morale des jeunes hommes. Les niveaux supérieurs n’étaient accessibles qu’aux hommes et aux femmes qui menaient une vie exemplaire et étaient prédestinés à assumer une fonction dirigeante au sein de l’association et du village. Les hommes ne pouvaient monter au plus haut niveau de la hiérarchie que si leurs épouses étaient initiées dans les grades féminins équivalents.

Les figurines en ivoire renvoyaient à des proverbes et avaient un rôle didactique. La dureté de l’ivoire représentait la continuité et des pouvoirs de guérison y étaient également attribués. Les figurines étaient transmises d’une génération à l’autre et acquéraient ainsi une patine douce et brillante très appréciée.

  • Statuette Iginga Lega EO.1955.3.136
    Pangi, Maniema
    Collectée par Biebuyck, 1952

  • Statuette Iginga Lega EO.0.0.38610
    Sud-Kivu
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

  • Statuette Iginga Lega EO.0.0.38694
    Sud-Kivu
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

  • Statuette Iginga Lega EO.1955.3.102
    Pangi, Maniema
    Collectée par Biebuyck, 1952

  • Statuette Lega EO.0.0.38582
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

  • Statuette Kalimbangola Lega EO.0.1959.35.2
    Maniema
    Achetée à A. Van Loo, 1959

  • Statuette Kamwenne ku masengo Lega EO.0.1955.3.150
    Pangi, Maniema - Alstonia congensis
    Collectée par Biebuyck, 1952

  • Statuette Wabalenga Lega EO.1955.3.145
    Pangi, Maniema
    Collectée par Biebuyck, 1952
    Cette figurine était un bien collectif. Elle représente Wabalenga “celui qui surpasse tout le monde”, l’initié supérieur sans qui il n’était pas possible de progresser au sein de l’association bwami.

  • Figurine animale Lega EO.1951.11.40
    Maniema
    Achetée à Mrs. Lemborelle, 1951

  • Figurine animale Lega EO.1951.11.41
    Maniema
    Achetée à Mrs. Lemborelle, 1951

  • Figurine animale Lega EO.0.0.38719
    Sud-Kivu
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

Les masques bwami renvoient aux membres exemplaires du bwami des générations précédentes. Ils étaient surtout utilisés dans des installations didactiques pour les initiés des grades supérieurs. Pendant les rituels, ils étaient tenus devant le visage, ou contre la tempe, la nuque ou l’épaule. Les masques en ivoire étaient appelés “crânes paternels” et servaient pendant les enseignements sur la mort.

  • Masque Muminia Lega EO.1955.3.1
    Pangi, Maniema - Coelocaryon preussi
    Collecté par Biebuyck, 1952

  • Masque Lega EO.0.0.38753
    Maniema
    Acheté à A. Van Hooren, 1939

  • Masque Lukwakongo Lega EO.1955.3.4
    Pangi, Maniema - Crossopteryx febrifuga
    Collecté par Biebuyck, 1952

  • Masque Lukwakongo Lega EO.1962.46.1
    Pangi, Maniema - Alstonia congensis
    Acheté à Nicolas de Kun, 1962

  • Masque Lukungu Lega EO.0.0.38741
    Sud-Kivu
    Acheté à A. Van Hooren, 1939

  • Cuillère Kalukili Lega EO.1959.35.7
    Maniema
    Acheté à A. Van Loo, 1959

  • Cuillère Kalukili Lega EO.1953.29.4
    Sud-Kivu
    Achetée à M. Delorme, 1953

  • Cuillère Kalukili Lega EO.1955.3.94
    Shabunda, Sud-Kivu
    Collectée par D. Biebuyck

Les villages qui collaboraient sur une base d’égalité étaient beaucoup plus difficiles à intégrer dans le système colonial que les royaumes centralisés. Les autorités belges considéraient dès lors que les institutions bwami ne constituaient pas une base solide pour la gouvernance indirecte : elles les jugeaient trop incontrôlables, arriérées et suspectes. En raison de leur caractère fermé, elles étaient souvent considérées comme des associations “secrètes”, voire comme une forme organisée de résistance. En 1947, les autorités coloniales ont interdit toute les initiations bwami. Toutefois, certains fonctionnaires coloniaux sympathisaient avec les pratiques bwami et les toléraient.

Statues moralisatrices Lega

Les associations Lega n’avaient pas d’autorité centrale mais étaient dirigées par une association structurée de façon hiérarchique : le bwami. Celui-ci comprenait différents grades, dont les plus élevés n’étaient accessibles qu’aux couples mariés. Pendant les initiations, des installations éducatives composées de statues et d’objets symboliques étaient utilisées. Chaque statue représentait le personnage d’une métaphore ou d’un aphorisme et avait son propre nom. Elles servaient à enseigner les comportements moralement acceptables, et le rôle des hommes et des femmes au sein du mariage et de la société.

  • Statuette Wayinda Lega EO.1955.3.75
    Shabunda, Sud-Kivu
    Collecté par D. Biebuyck, 1952
    Offert par l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale, Lwiro, 1955
    Ce personnage est Wayinda, une femme adultère tombée enceinte de son amant et ayant attiré ainsi la malédiction sur sa propre personne et sur sa famille. La statue évoque un proverbe : “Wayinda s’est tuée elle-même par souillure rituelle”.

  • Statuette Kakulu Lega EO.0.0.35409
    Kunda, Maniema
    Offerte par R. Baude, 1934
    Cette statue représente probablement Kakulu, “le malheureux époux trompé”. Il est le mari de Wayinda enceinte de son amant ou de Mukobania, la séductrice frivole qui aime semer la discorde.

  • Statue Mutu Nyabeidilwa Lega EO.1955.3.42
    Pangi, Maniema
    Collecté par Biebuyck, 1952
    Offert par l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale, Lwiro, 1955
    Cette statue représente une femme qui ne cesse de fuir son mari et de retourner dans sa famille. Elle renvoie à un proverbe : “Calao a été surprise la nuit. Où qu’elle aille, elle doit toujours être rappelée à la maison.”

  • Statue Katanda Lega EO.1955.3.40
    Pangi, Maniema
    Collecté par Biebuyck, 1952
    Offert par l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale, Lwiro, 1955
    Cette statue représente Katanda, une mauvaise femme adultère. Elle est tout ce qu’une femme bwami honnête ne doit pas être.

Les devins-guérisseurs en République démocratique du Congo

Les catastrophes naturelles, épidémies et autres coups du destin étaient généralement considérés comme des maladies sociétales. Celles-ci étaient à leur tour attribuées à une relation perturbée avec le monde des esprits. Pour éviter de tels malheurs et pour assurer le bien-être de la société, les chefs et aussi les gens ordinaires recouraient aux services de devins-guérisseurs, qui intervenaient en tant que médiateurs auprès du monde surnaturel.

Pour communiquer avec les esprits, le devin-guérisseur frappe en rythme sur un petit tambour à fente. Chez les peuples Yaka, chaque devin-guérisseur avait son propre esprit protecteur, qu’il invoquait à chaque rituel.

  • Tambours à fente masculin et féminin Yaka
    Gingungi, Kwilu
    Collectés par J. Thienpont, collection de l’ordre des Jésuites

Les peuples Kuba considéraient certains animaux comme des messagers du royaume des esprits. Un grand nombre de leur statuettes de divination représentaient ces animaux. Le devin-guérisseur frottait le dos de la statue avec un disque en bois tout en posant des questions. Lorsque le mouvement bloquait, il l’interprétait comme une réponse des esprits.

  • Oracle à friction Itombwa Kuba EO.0.0.20145
    Kasaï - Crossopteryx febrifuga
    Acheté à H. Pareyn, 1917

  • Oracle à friction Katatora Luba EO.0.0.23472
    Katanga - Crossopteryx febrifuga
    Acheté à la veuve de J. Michaux, 1919

  • Oracle à friction Katatora Luba EO.1980.2.1616
    Katanga
    Ex J. Walschot, 1980

Le devin-guérisseur et son client introduisaient chacun un doigt dans la partie creuse desobjet de divination Katatora. Pendant qu’ils le frottaient ensemble sur une natte, le devin-guérisseur interrogeait son client sur les causes du malheur qui l’avait frappé. Sous l’influence des esprits des ancêtres, l’objet effectuait des mouvements qui étaient ensuite interprétés par le devin-guérisseur.

L’association lemba dans le Mayombe

Lemba était une association rituelle active jusqu’au début du XXe siècle au nord du fleuve Congo inférieur. Lorsqu’une personne était admise dans l’association, cette adhésion s’accompagnait d’un mariage. En outre, un objet de force était confectionné en vue d’être utilisé par la suite dans des rituels de guérison. L’accès à l’association lemba était très coûteux, car il fallait offrir à boire et à manger à des centaines d’invités. Dans une société où l’égalité était une valeur importante, ce type de générosité contribuait à atténuer les conflits sociaux. L’investissement dans un moyen curatif était également bon pour l’image des riches membres du lemba, car il les protégeait contre la jalousie des autres.
Différents objets lemba représentent un couple marié. Leurs attributs et les postures qu’ils adoptent symbolisent la richesse, l’autorité et leur initiation aux arts rituels.

  • Objet de force, représentation d’un couple lemba Yombe EO.0.0.42920
    Mayombe
    Offert par L. Bittremieux, 1946

  • Objet de force, représentation d’un couple lemba Vili EO.1979.1.259
    Djéno, Kouilou
    Collecté par E. Dartevelle, 1938.

Art tribal africain et initiation mukanda

Aujourd’hui, les garçons luvale sont généralement initiés durant les vacances scolaires. Les mascarades makishi de fin d’initiation ont évolué jusqu’à donner lieu à de grandes fêtes et à des rassemblements sociaux et politiques importants. Parfois, les festivités éclipsent même l’objectif initial de l’école mukanda : l’éducation et l’enseignement.

  • Masque Nyau Chewa EO.2002.2.1
    Province du Sud, Zambie
    Collecté par B. Wastiau, 2002

  • Masque Katoyo Luvale EO.2002.2.41
    Province du Sud, Zambie
    Collecté par B. Wastiau, 2002
    Avec son nez pointu et sa moustache raide, ce masque représente un Européen. Il était utilisé lors des danses pour représenter les Européens comme des être gauches aux habitudes sexuelles étranges.

Art du Kongo Central et d’Angola

Dans la région du Mayombe (province du Kongo-Central), l’éducation des garçons comme des filles s’accompagnait d’une phase rituelle qui se déroulait dans un lieu isolé. Les garçons allaient à l’école khimba, un camp dans la forêt où ils recevaient l’enseignement d’un maître ainsi qu’un nouveau nom khimba. Les filles qui avaient atteint l’âge de se marier allait vivre dans la maison kumbi, où la vie de femme adulte leur était enseignée. Parfois, leur futur époux passait leur apporter des cadeaux.

  • Sceptre de danse Kongo EO.0.0.35045
    Muanda, Kongo-Central - Crossopteryx febrifuga
    Offert par L. Bittremieux, 1933
    Ce sceptre de danse khimba accompagnait la procession des garçons qui retournaient au village après leur séjour dans le camp en forêt. Il représente les deux garçons qui quittent le camp les premiers.

  • Fragment d’un montant de lit kumbi Yombe EO.0.0.35776
    Kangu, Kongo-Central - Adansonia digitata
    Offert par N. De Cleene, 1934
    Le lit dans la maison kumbi était orné de statuettes de filles et de leurs futurs époux. Leurs oncles maternels négociaient la dot.

Au début de la période coloniale, bien avant la reconnaissance de l’art africain en tant que tel, les statues de maternité de la région du Mayombe étaient très recherchées des collectionneurs. Les missionnaires et les médecins appréciaient particulièrement la manière dont elles exprimaient l’amour et le dévouement maternel. Les statues n’étaient pas tant collectionnées pour leur valeur ethnographique que pour leurs qualités artistiques. C’est pourquoi elles étaient souvent astiquées.

  • Statue de mère et enfant Pfemba Yombe EO.1948.371
    Mayombe, Kongo-Central - Nauclea pobeguinii
    Offerte par L. Bertrand, 1948
    Cette statue soigneusement astiquée a les yeux blancs accentués encore par des incrustations de verre en demi-lune. Le couvre-chef de forme mitrale est fréquent chez les statues phemba.

  • Statue de mère et enfant Pfemba Yombe EO.0.0.19848
    Mayombe, Kongo-Central - Celtis durandii
    Achetée à N. Arnold, 1917

  • Statue de mère et enfant Pfemba Yombe EO.0.0.24662
    Mayombe, Kongo-Central - Nauclea latifolia
    Ex J. De Briey, 1920

  • Statue de mère et enfant Yombe EO.1961.11.5
    Mayombe, Kongo-Central
    Achetée à J. Walschot, 1961
    Cette statue de mère et enfant est d’une taille inhabituelle et entièrement teinte en rouge. Les scarifications et les dents renvoient à l’idéal de beauté féminine des peuples yombe.

  • Statue de mère et enfant Vili EO.0.0.16610
    Cabinda, Angola
    Acquise avant 1898

  • Statue funéraire Ntadi Kongo EO.1953.32.24
    Noqui, Angola
    Achetée à R. Verly, 1953

Fertilité et autorité

Pour la plupart des habitants d’Afrique centrale, le fait d’avoir des enfants est un aspect important d’une vie accomplie. En témoignent les nombreuses statues de maternité réalisées par des artistes de régions et de périodes différentes.
Elles renvoient naturellement à la fertilité et à la reproduction, mais aussi, de manière plus générale, à la survie de la société, ce qui était l’une des responsabilités rituelles du chef. Ainsi les statues de maternité étaient-elles aussi souvent associées au pouvoir politique.

  • Mortier à tabac en forme de mère avec son enfant EO.1953.74.5465
    Tshikapa, Kasaï - Rubiaceae
    Collecté par A. Maesen, 1955

  • Statue de mère et enfant Luluwa EO.0.0.7157
    Kasaï-Central - Balanites wilsoniana
    Achetée à De Bruyn, 1912

Les statues pindi représentent souvent un homme et une femme, qui porte un enfant. Les chefs Mbala invoquaient la force de ces statues en cas de guerres, de mauvaises récoltes, d’épidémies ou de catastrophes naturelles. Les statues pindi jouaient également un rôle dans les rituels de succession et lors de l’intronisation d’un nouveau chef.

  • Statue de mère et enfant Mbala EO.0.0.16605
    Kwilu
    Acquise avant 1898

  • Statue de mère et enfant Yaka EO.0.0.44737
    Kwango - Crossopteryx febrifuga
    Offerte C. Elter, 1947

  • Statue de mère et enfant Yaka EO.0.0.35922
    Kwango
    Achetée à J. Javaux, 1935

  • Statue de mère et enfant Khosi Yaka SJ.388
    Ngowa, Kwango
    Collectée par J. Van Wing

  • Statue de maternité EO.1979.1.221
    Maquela do Zambo - Crossopteryx febrifuga
    Collectée par E. Dartevelle, 1938

Figures Mankishi : statues protectrices de la fertilité

Les peuples Songye avaient des statues dotées de forces particulières (mankishi, sing. nkishi). Ils les utilisaient pour guérir les maladies et se protéger. Les mankishi de petite taille servaient à résoudre des problèmes personnels ou familiaux. Les grands mankishi protégaient la société des accidents et de la sorcellerie. Ils assuraient la fertilité des femmes et aidaient les esprits des ancêtres à se réincarner dans les corps des nouveaux-nés.

Les grands mankishi étaient généralement commandés à des sculpteurs de renom et servaient au village durant de nombreuses générations. Ils étaient activés au moyen de substances dotées de forces naturelles introduites par le nganga dans des cavités pratiquées dans la tête et le ventre de la statue. Le nganga est l’expert rituel capable de communiquer avec le monde des esprits.

  • Objet de force Nkishi Songye EO.1980.2492
    Lomami
    Ex J. Walschot, 1980
    Les baguettes incurvées de nkishi renvoient probablement à la créature mythique de “l’arc-en-ciel”. Il capte les esprits des défunts au moyen de deux crochets et les renvoie à la terre, où ils se réincarnent dans les corps des nouveaux-nés.

Masques de bois et de fibres

  • Masque Yaka EO.0.0.31424
    Kwango - Alstonia congensis
    Ce masque était tenu devant le visage à l’aide d’une poignée. La maisonnette évoque le futur logement des garçons initiés, prêts désormais à fonder une famille et à procréer.

  • Masque Kamdaandzya Yaka SJ.1327
    Kingunda, Kwango
    Collecté par A. Pauwels. Collection de l’ordre des Jésuites, 1929.
    Ce masque en fibres représente Tsetsi, une petite antilope rusée qui, dans les fables, échappe toujours aux prédateurs. Pendant le mukanda, elle faisait figure d’exemple pour les garçons.

  • Masque-heaume Suku EO.0.0.15374
    Kindundu, Kwilu - Ricinodendron heudelotii
    Offert par la Compagnie du Kasaï, 1913
    Les artistes des peuples Suku réalisaient d’élégants masques à visage blanc et les décoraient avec des scènes représentant des humains, des oiseaux ou d’autres animaux.

  • Masque Kisokolo Nkanu EO.1991.21.2
    Kimvula-Madimba, Kongo-Central
    Créé par Ignace Magebuka, 1991
    Acheté à A. Van Damme, 1991
    Kisokolo représente un coureur de jupons. Son nez recourbé est un symbole phallique. À la fin du mukanda, il dansait avec le masque féminin makemba en effectuant des mouvements sensuels.

  • Masque Ndeemba Yaka EO.0.0.1929-2
    Popokabaka, Kwango - Alstonia congensis
    Offert par A. Verhavert, 1910
    Le nez de de ce masque représente une trompe d’éléphant, symbole de virilité. À la fin du mukanda, il était coupé et brûlé. Les cendres étaient utilisées comme amulette de fertilité lors du mukanda suivant.

  • Masque Kakuungu Suku EO.0.0.26520
    Gingungi, Kwilu
    Offert par J. Van Wing, 1922
    Ce masque Kakuungu, était porté par les maîtres initiateurs. Il effraie et impose l’obéissance tout en protégeant les garçons contre la sorcellerie. Le jour de la circoncision, Kakuungu encourageait les garçons à se montrer courageux.

  • Masque-heaume Hemba Kwese EO.0.0.37175
    Kikwit, Kwilu - Ricinodendron heudelotii
    Offert par J. de Decker, 1937
    Ce masque-heaume, qui recouvre entièrement la tête du danseur, est typique des peuples hemba. Il a été réalisé dans un bloc de bois évidé.

  • Masque Gitenga Pende de l’Ouest EO.1980.2.1162
    Kwilu
    Ex J. Walschot, 1980
    Gitenga était le meneur d’un groupe de masques aux yeux exorbités et vêtus de filets. Ensemble, ils semaient la terreur dans le camp. Gitenga représente le soleil couchant et symbolise la régénération.

  • Masque Pwo Chokwe EO.0.0.32510
    Région de Tshikapa, Kasaï - Alstonia
    Offert par A. Gohr, 1930
    Ce masque représente la femme idéale mais était porté par un homme. Pwo porte de superbes scarifications et des dents limées (deux signes de beauté) et est un être surnaturel bienveillant.

  • Masque Luluwa EO.0.0.3341-3
    Kasaï-Occidental - Alstonia congensis
    Acheté à H. Pareyn, 1911
    Les peuples Luluwa ont repris les pratiques et les masques du mukanda de leurs voisins Chokwe. À la fin de l’initiation, ce masque chassait les mauvais esprits au moyen de son épée.

La collection d’art africain Aloïs Tembo

Aux environs de Kangu, un village de la région du Mayombe (province du Kongo-Central), une collection unique de statues de force a été constituée en 1915. Ces objets, qui se représentent sous des formes humaines, animales et autres, avaient été données par leurs propriétaires à la mission catholique. Aloïs Tembo, un catéchiste local, a consigné le nom de ces statues et noté celles qui étaient utilisées à des fins divinatoires, médicinales ou de protection spirituelle.

  • Statue de pouvoir Nkisi Manyangu Yombe EO.0.0.22485
    Mayombe
    Achetée aux Missionnaires de Scheut, 1919
    Ce nkisi impressionnant était connu sous le nom de Manyangu. Il provoquait le lubanzi chez ses victimes, une maladie qui s’accompagne de points de côté et de difficultés respiratoires.

  • Statue de pouvoir Nkisi Mambuku Mongo Yombe EO.0.0.22438
    Mayombe
    Achetée aux Missionnaires de Scheut, 1919
    Mambuku Mongo était un nkisi qui se présentait tantôt sous forme humaine, tantôt sous forme non figurative. Il était surtout utilisé à des fins divinatoires, mais il pouvait aussi donner des maux de tête ou même provoquer la folie. Les propriétaires étaient souvent des femmes qui dansaient, chantaient, secouaient des hochets et reniflaient la statue pour savoir ce que le nkisi avait à dire.

Renommée et prestige : art royal Kuba

Grâce aux premières collections d’art kuba et aux ouvrages des premiers anthropologues tels qu’Émil Torday (1875-1931), celui qui a acquis la statue ndop du roi Miko miMbul, les milieux européens ont rapidement pris conscience que les peuples kuba avaient une culture matérielle très développée. Cette réputation a contribué à ce que le royaume kuba puisse conserver une position relativement autonome au sein de l’état colonial. La cour kuba entretenait aussi des contacts avec le monde extérieur. Ainsi, Mbop Mabinc maKyeen, qui a régné de 1939 à 1969, a reçu à plusieurs reprises des visites royales européennes et entretenait une correspondance avec des personnes en dehors du Congo.

Les ndop sont des statues commémoratives pour les rois (nyim). L’identité du roi est indiquée par l’ibol, le symbole personnel de sa royauté, représenté devant lui. Ce ndop représente le roi Miko miMbul, qui a régné au début du XIXe siècle. Son ibol est parfois interprété comme représentant une jeune esclave.

  • Statue royale Ndop Kuba EO.0.0.27655
    Mushenge, Kasaï - Crossopteryx febrifuga
    Collectée par Mr. Vandenabeele. Offert par les Amis du Musée, 1924

  • Coupe anthropomorphe Kuba EO.0.0.2555-7
    Kasaï-Occidental
    Acquise avant 1898
    Ce récipient a la forme d’une tête humaine. Les jambes sont directement rattachées à la nuque. Les détails du visage rappellent le style de certains masques kuba.

  • Appui-tête Kuba EO.0.0.19224
    Kasaï-Occidental - Crossopteryx febrifuga
    Collecté par J. Maes, 1914
    Des objets utilitaires de la vie quotidienne, comme les appui-têtes, témoignent eux aussi de la maîtrise atteinte par les artistes kuba sur le plan de la conception, du jeu des lignes et des volumes.

La liste d’objets présentés dans cet article n’est bien entendu pas exhaustive et nous vous encourageons à visiter le Musée royal de l’Afrique centrale afin d’en découvrir les chefs d’œuvre. Les collections ne se limitent d’ailleurs pas aux objets d’art tribal mais comportent également un échantillon des richesses minérales et biologiques de la République démocratique du Congo ainsi qu’une aile dédiée à l’histoire coloniale belge.

Sainsbury African Galleries au British Museum : Noël dans l'art africain au coeur de Londres

Etienne Z

Superbe perspective nocturne de la ville de Londres, en particulier Tower Bridge depuis le sommet du Shard

L’art tribal africain au British Museum, Londres

Dans la continuité de nos visites au Musée africain de Namur et au Musée International du Masque de Binche, je faisais, à l’occasion de Noël, une petite visite du fameux British Museum de Londres pour notre Galerie L&Z Arts. De quoi vous ramener quelques images et un récapitulatif de ce qu’on trouve au sous-sol, plus précisément dans la galerie Sainsbury dédiée à l’art tribal africain dans laquelle le visiteur, en l’occurence moi, sera émerveillé par la vie culturelle d’Afrique, à la fois passée et présente.
On y trouve de nombreuses pièces d’art primitif provenant de divers groupes ethniques à travers le continent au cours des siècles : des objets du quotidien comme des pièces d’exception.
Le British Museum possède pas moins de 73 000 objets d’art premier africain (statues, masques, bronzes et céramiques confondues) dont une infime partie seulement est exposée. En regard de ces objets d’intérêts ethnographique et historique, on découvre aussi les travaux d’artistes contemporains renommés inspirés par l’art primitif africain.

L’entrée de la galerie d’art africain “Sainsbury”.

Figures des Luba, Dogon, Baoulé,…

La première salle nous plonge immédiatement dans le coeur du sujet ; les amoureux du Congo en seront ravis puisqu’on y observe des pièces Luba comme ce fameux siège à caryatide dans le style du Maître de Buli, si expressif, trônant à côté d’une statue féminine à la patine noire encore suintante d’huile. On notera la présence de pièces plus petites telles que des appuie-nuques figuratifs d’une finesse remarquable dont les personnages caryatidiques arborent la coiffe si particulière du(es) maître(s) de la coiffure en cascade.
À proximité, une modeste figure aux bras levés et à l’épaisse patine croûteuse datant du 14ème siècle représentant probablement un nommo (ancêtre mythologique) attribuée par les Dogon à un peuple les ayant précédés dans la région des falaises de Bandiagara au Mali : les Tellem. Ces pièces ancestrales bien souvent sorties de leur contexte ont rendu leur étude difficile. Elles sont néanmoins attribuées au culte de la pluie ou étaient inhumées avec leur propriétaire. Enfin, discrètement perchée sur son socle, une magnifique statue féminine Bambara dont le tronc est couvert de scarifications, apparemment liée au culte des ancêtres et à la fécondité.

Des couteaux en fer aux pots en terre

D’autres pièces viennent compléter cette sélection, dont deux statues royales des Kuba-Bushoong de type Ndop, l’une dans la première salle et l’autre dans la seconde. Pour rappel, les rois Kuba étaient parfois commémorés au travers de figures qui, bien que n’étant pas à proprement parler des portraits, présentaient des caractéristiques et éléments spécifiques au roi qu’elles représentaient et devaient par ailleurs contenir leur esprit.
Dans cette seconde salle, on découvre également une riche collection de “couteaux de jet” aux formes plus complexes les unes que les autres ainsi qu’un ensemble de boucliers. Le terme “couteaux de jet” fût inventé par les ethnologues afin de classer une large gamme d’objets ne pouvant être décrits comme des haches, des lances ou des épées et dont certains étaient destinés à être lancés. On retrouve ces fameux couteaux dans une vaste région de l’Afrique, des plaines du Sahara jusqu’aux denses forêts bordant le fleuve Congo.
Dans la suite logique, quelques outils de forgeron sont exposés. Mais n’oublions pas de mentionner les figures colorées igbo ainsi que plusieurs figures de reliquaires Kota, dont une janiforme.
Un grand espace est également dédié à la poterie et aux céramiques, parfois antiques, qui servaient des desseins tantôt usuels, tantôt rituels mais témoignent toutes d’une maîtrise technique et d’un souci stylistique évidents.

Quelques masques africains de plus

Avant d’atteindre le clou du spectacle, à savoir la dernière salle, on s’arrêtera quelques instants pour jeter un oeil attentif à une sélection de masques dont l’imposant Nimba des Baga, présenté ici avec son épaisse coiffe de raphia ; ainsi qu’à des masques striés du culte Kifwebe des Songye dont un exemplaire à l’allure tout à fait particulière, bien loin des canons stylistiques habituellement rencontrés. Un Mbap mteng est aussi exposé, long masque couvert de coquillages représentant l’éléphant chez les peuplades du Grassland au Cameroun.
Quelques pièces en ivoire viennent compléter la longue vitrine : des statuettes Lega liées au culte du Bwami, et des masquettes-amulettes protectrices Ikhokhoo des Pende portées autour du cou par les garçons nouvellement initiés et représentant les masques qu’ils seront destinés à porter ultérieurement.
Notons enfin la présence d’autres masques des groupes Dan, Bron, Senoufo, Mende,… Une imposante porte Yoruba décorée de nombreux personnages colorés ainsi qu’un panneau ancestral Kalabari sont exposés sur les murs.

L’exceptionnelle collection de bronzes et ivoires du royaume de Bénin

La dernière salle nous ouvre les portes du royaume de Bénin au travers d’une collection unique de diverses pièces en bronze, ivoire et corail : plaques figuratives, têtes, masques, cavaliers, léopards etc sont au rendez-vous.

L’un des quatre masques pectoraux. Ivoire, fer, cuivre. H. 22.5cm

La collection de pièces du Bénin présente au British Museum est l’une des plus célèbres au monde. On peut la subdiviser en deux groupes distincts : d’une part les ivoires et bronzes du palais royal façonnés par les artistes de la cour comme objets régaliens. D’autre part, les objets en ivoire taillés expressément comme objets souvenirs destinés aux premiers Européens à être entrés en contact avec l’Afrique de l’ouest.
Selon N. MacGregor, directeur du musée, les bronzes de Bénin ont toujours eu une portée politique, exprimant initialement l’hégémonie et la domination de la royauté sur le monde extérieur.
Alors que les pièces en bronze exposées ont été acquises par le British Museum de différentes manières au fil du temps (dons, legs, achats), toutes proviennent, à l’origine, de la mise à sac du palais royal par l’expédition punitive lancée par les forces britanniques en 1897 à la suite du massacre d’une délégation diplomatique la même année.
Indépendamment de la question très actuelle de la légitimité et du rapatriement des pièces acquises, je vous invite à découvrir ces pièces en gardant à l’esprit la richesse culturelle et historique qu’elles représentent.

Ci-dessous, les plaques du palais, chacune étant unique, figurant tantôt des soldats, des dignitaires ou des colons portugais armés de leur fusil. Ces plaques ornaient les piliers du palais. Chaque détail a fait, et fait encore de nos jours, l’objet d’études approfondies. Ces pièces inestimables d’un point de vue artistique constituent également de fabuleux témoignages historiques.
Les représentations de cavaliers sont quand à elles connues pour avoir été exposées sur des autels royaux. Les connaissances actuelles à leur sujet laissent encore cependant une bonne place au doute quant à leur identification. Les avis divergent donc sur leur signification.
Les forgerons edo ont fait la part belle aux représentations de léopard, qu’il s’agisse de masques ou de figures complètes, animal mythologique dans l’histoire du royaume, ainsi qu’aux têtes coulées à l’effigie de rois et de reines et à d’autres objets tels que les épées cérémonielles eben.

Art traditionnel et art contemporain

Revenons, pour terminer, sur l’aspect scénographique du British Museum. Si l’on peut regretter la mise en valeur — et surtout l’éclairage ! — relativement pauvre des objets exposés qui ne m’a définitivement pas aidé dans ce reportage photographique, on notera que des espaces ont été dédiés d’une part à des artistes africains contemporains ainsi qu’à des oeuvres inspirées par l’art tribal.
Ainsi, une toile à l’allure warholienne de l’artiste du Botswana Ann Gollifer, dans laquelle Marylin Monroe est remplacée par une déclinaison d’un masque Lipiko Makonde, orne la cage d’escaliers menant à la galerie Sainsbury. À l’intérieur, plusieurs oeuvre contemporaines occupent l’espace : “Tree of life” — assemblage de pièces d’armes à feu — ; “Les femmes Peul”, fétiche élancé par l’artiste Gérard Quenum sur les thèmes de la maternité et de la guerre ; et enfin, un thème que je vous invite à explorer plus en profondeur au Musée de Binche : les mascarades africaines au Carnaval avec les figures Moko Jumbie de l’artiste britanico-trinidadien Zak Ové.

Galerie L&Z Arts partenaire du Musée International du Carnaval et du Masque de Binche

Etienne Z

Quel meilleur lieu pour accueillir le Musée International du Carnaval et du Masque que le centre de la ville de Binche dont le carnaval vieux de plus de six siècles a été élevé au rang de patrimoine culturel et immatériel de l'humanité par l'UNESCO ?
Passons cette question rhétorique et découvrez notre visite exclusive de ce lieu au sein duquel vous voyagerez parmi les traditions masquées du monde entier.

Le musée est installé dans ce qui était au départ l'ostel du comte de Lalaing dont la première mention date de 1570, un lieu d'intérêt donc, qui a traversé les siècles et a accueilli diverses institutions avant d'être classé en 1965 par la Commission royale des Monuments et des Sites. C'est en 1975 que Samuel Glotz inaugure le musée qui n'a cessé de se réinventer et dont les collections atteignent désormais les 10 000 pièces (masques, tenues, instruments, marionnettes et autres objets connexes confondus). Stéphane et moi avons été aimablement reçus par la directrice actuelle, Mme Clémence Mathieu qui nous a fait visiter la partie publique mais également le Saint des saints du musée : la réserve où dorment les pièces attendant patiemment d'être exposées.

Des masques revisités et des fétiches

Concrètement, le rez-de-chaussée accueille les expositions temporaires à thème mettant à l'honneur des artistes et des structures partenaires. Lors de notre visite, on pouvait, en autres, observer une ré-interprétation de masques phares de l'art africain — Songye, Lega, Pende — créée par l'artiste plasticien Jean-Marc De Pelsemaeker dont le support de développement de l'écriture picturale emprunte souvent des thèmes trouvés dans l'histoire de l'art, la religion, la vie quotidienne. Des masques africains récents sont ici couverts d'une couche de peinture phosphorescente complétée d'une calligraphie personnelle chargée d'images et de symboles.

La suite du niveau est actuellement attribuée à l'exposition "Guérir - Ensorceler" faisant découvrir au visiteur les objets et cultes magiques en lien avec le fétichisme. Ce dernier traîne une réputation négative dans l'imaginaire collectif. À une salle aux couleurs noir et rouge accueillant des objets et mises en scène liés à des rituels maléfiques, succède une salle claire et chaleureuse où sont exposés des objets divinatoires et apotropaïques, la face généralement méconnue du fétichisme tribal.
Fétiche à clous Nkisi Nkonde, accordéon Pende Galukoji, objets vaudou Bizango, panier de chaman Chepang, masques, poupées et hochets, autant d'objets issus de différents continents qui répondent à des besoins mystiques et superstitions dans la vie des communautés. Exposition prolongée jusqu'au 23 septembre 2018, vous avez donc encore quelques jours pour en profiter.

Les masques des 5 coins du monde

L'étage supérieur se subdivise quant à lui en plusieurs parties distinctes. On y trouve l'exposition permanente de masques africains, océaniens, américains, asiatiques et européens ainsi qu'une partie spécialement dédiée au carnaval de Binche, aile actuellement en cours de refonte intégrale pour accueillir, à terme, une scénographie interactive et innovante.
Un espace est réservé à l'expo temporaire des mascarades d'une région spécifique, "Au royaume des touloulous, Carnaval de Cayenne" lors de notre visite. Dans ce cadre, le musée concrétise sa volonté de proposer une muséographie moderne et originale en réintégrant les masques à leur contexte rituel afin d'optimiser l'impact muséal de l'exposition sur le visiteur.
En effet, comme en parle Marc Coulibaly dans son ouvrage Des masques cultuels au masque muséifié, la mise en scène muséographique des masques a tendance à les figer dans la mesure où seule la forme plastique est mise en valeur par une scénographie elle-même devenue un art, ce qui a pour conséquence de faire fi du contexte du masque et de son usage.
Pour offrir une expérience contextualisée, le musée a utilisé diverses techniques scénographiques dont deux installations audiovisuelles : l'une place le spectateur au centre de plusieurs écrans de projection où il observera des films illustrant les danses masquées. Dans l'autre salle, le visiteur devient auditeur ; il est plongé dans un espace confiné au cœur de l'ambiance sonore qui accompagne ces festivités. Deux installations créées par Laure Chatrefou et Anne Guillou.
Ensuite, une large variété de masques est exposée tantôt sur socles, tantôt en vitrine, classés selon qu'ils proviennent de tel ou tel continent. Le visiteur pourra constater, malgré la richesse des formes, des motifs et des significations, que certains éléments sont récurrents en dépit des distances, voire d'un continent à l'autre. Ces patterns de traits communs concernent les thématiques abordées mais aussi les formes, les matériaux et les techniques employés. 
Une opportunité d'étude comparative qui illustre bien les propos de M. Mead en 1970 : "En illustrant les différences culturelles de chaque groupe humain et en soulignant les contributions qu'ils font à la société, les musées peuvent aider les gens à mieux se situer dans leur humanité commune."
Le visiteur appréciera par ailleurs les descriptifs concis qui accompagnent les pièces. Il est bon de noter que le musée considère le masque dans sa globalité et pas seulement au sens facial où l'on a tendance à l'entendre. Ainsi, autant que possible, les tenues intégrales sont présentées, ce qui, en plus d'un souci évident de fidélité à la réalité, permet au visiteur de prendre la pleine mesure de ces costumes rituels et participe une nouvelle fois à la contextualisation des pièces.

Ces tenues parfois composées de fibres végétales ou d'autres matériaux fragiles sont stockées dans des conditions d'hygrométrie adaptées afin d'en assurer une conservation optimale. C'est au sous-sol que Stéphane et moi avons pu découvrir la réserve où sont entreposés des milliers de pièces dont l'inventaire est en cours : la caverne d'Alibaba pour tout collectionneur d'art primitif, pas seulement africain, et une opportunité exclusive pour L&Z Arts.
Qui dit acquisition de biens culturels originaires de pays éloignés pose une question éthique. Mme Mathieu témoigne de la sensibilité du musée à ce sujet qui veille à la qualité de ses sources en étant fourni depuis longtemps par des ethnographes et chercheurs présents sur le terrain.

Musée International - Public local

On l'a vu, le Musée du masque de Binche est un formidable outil doté de pièces aussi nombreuses que variées et mu par une volonté de modernité et d'interactivité : des animations y sont régulièrement organisées comme par exemple une reconstitution de mascarade des touloulous de Cayenne en lien avec l'exposition, évènement qui pourrait suggérer, un jour ou l'autre, la reconstitution de danses ethniques africaines ?
Actuellement, le public est constitué de nombreuses écoles qui représentent à elles seules la moitié des visites annuelles. Ce lieu du patrimoine wallon mérite à nos yeux l'intérêt d'un plus vaste public, sentiment partagé par la directrice Mme Mathieu qui souhaite attirer davantage de visiteurs à une échelle plus grande. C'est avec plaisir et honneur que Stéphane et moi par le biais d'L&Z Arts apporterons notre aide au développement et à la promotion du MUM afin de faire connaître ce petit joyau hainuyer à nos amis collectionneurs en Belgique et à l'étranger.

Pour visiter ce lieu : Rue Saint-Moustier 10, 7130 Binche, Belgique

Visite au Musée Africain de Namur

Etienne Z

Divers masques africains. Pende, Yaka, Suku, Ngeendé, Luba, Kongo, Chokwe : autant d'ethnies représentées.

Un bref historique

Pour présenter le Musée Africain de Namur, un petit retour en arrière s'impose. On remonte à l'impulsion coloniale lancée par Léopold II pour l'ouverture de voies destinées à permettre l'accès au plus profond du continent africain, et en particulier du Congo.
Cet appel à l'exploration a suscité l'intérêt de pas mal de personnes dont des Namurois. Tous n'en revinrent pas indemnes voire pas du tout, et les survivants se rassemblèrent pour former une association sous le nom de "société d'études et d'intérêts coloniaux".
Au fil des années et toujours dans l'optique de faire découvrir l'Afrique et plus particulièrement le Congo à tout un chacun, l'idée de la création d'un musée germa pour se concrétiser en 1912.
La structure changea plusieurs fois de nom dans les décennies qui suivirent et l'implantation du musée fut plusieurs fois déplacée pour finalement se fixer dans la caserne Léopold (dite des lanciers) dans le centre de Namur.
Progressivement, les collections du musée se sont enrichies grâce à des dons à la fois de la famille royale, de pères missionnaires, de personnalités militaires, d'anciens coloniaux ainsi que grâce à des mécènes.

Des masques africains mais pas seulement

La première salle du musée permet de se plonger à la fin du XVIIIème siècle. À renfort de cartes de l'Afrique établies au fur et à mesure des années, on observe le découpage des territoires et l'exploration progressive des contrées jusqu'alors vierges de toute colonisation occidentale. En parallèle sont présentés les portraits, journaux de bord, carnets et historiques des diverses expéditions effectuées par de grands noms comme Stanley, Vrithoff, Ramaeckers,...
Une introduction historique bien utile à la compréhension des liens qui nous unissent encore aujourd'hui au Congo.

Dans les salles qui suivent, le visiteur découvrira bien sûr des objets ethniques comme des masques, des statues, des bronzes et divers objets usuels (instruments de musique, vanneries,...). Sur les murs est exposée une impressionnante collection de couteaux de prestige, de lances et d'arcs d'une rare variété ayant appartenu à Josué Henry de la Lindi, une bonne centaine de pièces dont ses descendants ont aimablement fait don au musée. Une collection qui ravira sans aucun doute tout amateur d'armes tribales authentiques.
Sanza, tambours à fente et divers oliphants en ivoire et os sont aussi présentés.
Plusieurs vitrines permettent quant à elles de faire découvrir au visiteur la variété des masques africains congolais à travers plusieurs pièces emblématiques comme les masques de guerrier Salampasu, les masques Pende (Mbangu, Mbuya,...), Chokwe, Suku et Yaka,... De petites figurines Kongo, Chokwe et bien d'autres encore sont visibles. Si des étiquettes sont présentes pour identifier les pièces, on regrettera l'absence de catalogue du musée offrant un complément d'information pour toutes les pièces présentées. Des visites guidées didactiques sont cependant proposées par le directeur-conservateur M. François Poncelet qui parvient à capter et maintenir l'attention du public sur tous les aspects qu'il développe, ni trop ni trop peu, tout en chassant les idées reçues sur l'art primitif. J'en veux pour exemple la petite anecdote concernant l'un des masques Chokwe n'ayant aucun lien avec une quelconque initiation mais simplement sculpté pour se moquer de l'apparence des colons blancs et de leur prétention.
M. Poncelet démontre par là que les objets d'art africain n'ont pas nécessairement une portée rituelle mais participent à une forme d'expression et de communication des individus.

Une réflexion contemporaine

Une volonté de réflexion sur ce passé délicat
— F. Poncelet, conservateur-directeur

L'ombre de Léopold II sur le Congo, une belle métaphore.

Si la seconde salle comporte un buste de Léopold II triomphant, la triste réalité a rattrapé la réputation de ce personnage — auparavant présenté comme héros — à cause des exactions commises par son administration dans le cadre du pillage des richesses naturelles et l'exploitation systématique des tribus locales. 
On appréciera que le musée ait choisi d'assumer pleinement cet héritage avec ses bons et ses mauvais aspects, et présente plutôt une volonté de réflexion sur ce passé délicat. La démarche va plus loin puisque c'est selon cette réflexion que le directeur choisit de faire découvrir au public la salle dédiée aux richesses naturelles du Congo avec un accent tout particulier mis sur les richesses géologiques et minerais précieux pillés de longue date par l'Union minière puis indirectement par les multinationales peu scrupuleuses par l'entremise de groupes armés.

Ainsi, M. Poncelet fait ou refait la lumière sur le lien étroit entre les gadgets high-tech de notre vie quotidienne et les problèmes humanitaires qui en découlent dans ces lointaines contrées. On notera la présence de "croisettes du Katanga" à la fois objets rituels et monnaies de cuivre.
On le voit jusque là, le musée n'a pas pour vocation d'être focalisé sur l'art africain. Une belle superficie est d'ailleurs réservées à la nature et à l'énorme biodiversité vivant dans ce pays aux régions tantôt planes, clairsemées et sèches, tantôt montagneuses, boisées et humides. De nombreux spécimens de toutes sortes forment un petit musée des sciences naturelles du Congo.

"Croisettes du Katanga"

Le Musée Africain de Namur ne doit donc pas être envisagé comme un musée d'art ou d'ethnographie au risque de décevoir, mais plutôt comme un lieu de mémoire retraçant depuis les débuts de la colonisation jusqu'à nos jours le lien qui nous unit au Congo. Les objets ethniques sont néanmoins présents et conservent un intérêt pédagogique, tout comme le reste du musée.
Pour visiter ce lieu : Rue du 1er Lanciers 1, 5000 Namur, Belgique.
https://musafrica.net/